Critique de l'enquête de l'ENVEFF

"10% des femmes victimes de violences conjugales", c'est le résultat d'une enquête "Nommer et compter les violences envers les femmes" menée par Maryse Jaspard et l'équipe de l'ENVEFF et commanditée par le Secrétariat des droits des femmes...

Le 21 janvier 2003, lors de la journée consacrée aux violences conjugales, un journaliste d'une radio périphérique annonça au journal de 20h : "10% des Françaises sont battues par leur mari !"

Mazette ! Mais c'est ENORME, gravissime, scandaleux !!

Oui et non en fait. Oui, car si la France comptait réellement 10% de femmes battues on aurait un grave problème ; Non, car 10% est en fait l'indice global de violence conjugale, qui inclut les "pressions psychologiques" et autres insultes...

Comme l'explique Elisabeth Badinter dans son dernier ouvrage "Fausse route" :

L'extension du concept de violence aux agressions verbales et aux pressions psychologiques telle qu'elle est revendiquée par la récente enquête "Nommer et compter les violences envers les femmes" ouvre la porte à toutes les interprétations.
Comment mesurer par questionnaire fermé "l'atteinte à l'intégrité psychique d'une personne ?" Où commence l'insulte dans un lieu public et où finit-elle ? Ce qui est ressenti par l'une ne l'est pas nécessairement par l'autre, et la question est laissée à l'appréciation de chacune. De même en ce qui concerne les pressions psychologiques dans le couple. Parmi les neuf questions censées mesurer ce type de violence, certaines laissent pensif. Par exemple celles-ci : "Au cours des douze derniers mois, est ce que votre conjoint ou ami(e) : a critiqué, dévalorisé ce que vous faisiez ? A fait des remarques désagréables sur votre apparence physique ? Vous a imposé des façons de vous habiller, de vous coiffer, ou de vous comporter en public ? N'a pas tenu compte ou a méprisé vos opinions ? A prétendu vous expliquer ce que vous deviez penser ?"
Le malaise grandit quand on retrouve ces pressions psychologiques - qui reçoivent le plus haut pourcentage de réponses positives - figurer dans l'indice global des violences conjugales à côté des "insultes et menaces verbales", du "chantage affectif" et au même titre que les "agressions physiques" les "violes et autres pratiques sexuelles imposées".
L'indice global de violence conjugale ainsi calculé toucherait donc 10% des Françaises, étant entendu que 37% d'entre elles se plaignent de pressions psychologiques, 2,5% d'agressions physiques et 0,9% de viols ou autres pratiques sexuelles imposées.
La perplexité l'emporte. Est-il possible d'ajouter les actes physiques aux sentiments psychologiques comme s'il s'agissait d'éléments de même nature ? Est-il légitime de réunir sous le même vocable le viol et une remarque désagréable ou blessante ? On dira que, dans les 2 cas, une douleur est éprouvée. Mais ne serait-il pas plus rigoureux de distinguer entre la douleur objective et la douleur subjective, entre la violence, l'abus de pouvoir et l'incivilité ? Le terme de violence est si lié dans nos esprits à la violence physique qu'on court le risque d'engendrer une regrettable confusion et de laisser croire que 10% des Françaises sont agressées physiquement par leur conjoint.
Cette addition de violences hétérogènes qui reposent sur le simple témoignage de personnes jointes au téléphone fait la part belle à la subjectivité. En l'absence de confrontations avec le conjoint et d'entretiens approfondis, comment prendre pour acquis les réponses obtenues ?

Voyez, cette enquête est douteuse. Je voulais m'amuser à répondre au questionnaire, mais il est fichtre long, et j'ai autre chose à faire. Mais à lire les questions, ils auraient pu les poser aussi AUX HOMMES, parce que pour ce qui est des pressions psychologiques, nous les femmes sommes tout à fait capables de les faire subir, et certaines ne se gènent pas ! Ca me fait penser à mon ex. qui me reprochait régulièrement mes idées libérales, tandis que moi je l'accusais d'être étatiste.. Diable, nous étions tous deux victimes de violence conjugale !! Qu'est ce qu'il ne faut pas entendre...

Mais ce résultat convient à mon avis au commanditeur : le Secrétariat des droits des femmes. Ben tiens, 10% de femmes victimes de violences conjugales, ça donne du boulot à tous ces fonctionnaires, et on va pouvoir faire des lois pour protéger les femmes, et on fait de la discrimination, soit disant pour NOUS aider..

Liens :

  • Dossier de presse : présentation de l'enquête
    Où on peut lire "Toutefois distinguer séparément des types de violences verbales, psychologiques, physiques ou sexuelles s’avère peu pertinent (sic !!), car dans de nombreux cas ces formes d’agressions s’entrecroisent, le terme de situation de violence conjugale apparaît plus à même de rendre compte de la réalité vécue par le plus grand nombre de victimes."
    Evidemment, une femme qui prend des beignes se fait insulter, c'est trivial.. Mais une femme qui est méprisée par son conjoint est-elle victime de violence ??
  • Le questionnaire
    C'est hyper long ! Imaginez vous répondre à toutes ces questions par TELEPHONE ! De plus, je viens de voir que l'introduction est mensongère : "Nous réalisons une étude sur les conditions de vie, la santé et la sécurité en France" euh.. c'est censé être une enquête sur les violences faites aux femmes...
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